Sermon du 25 décembre 1999





SERMON DE NOËL
(Inspiré au messager pour une paroisse)

Mes frères,

Il est de tradition, chez les chrétiens que nous sommes, de nous réunir chaque année pour célébrer ensemble la naissance de Jésus. La crèche qui orne nos églises et nos maisons témoigne de cet événement. Cependant, nous sommes-nous interrogés sur l’identité de ce Jésus que nous fêtons ? Par exemple, nous sommes-nous demandé s’il correspondait fidèlement à celui que l’Église nous présente comme le Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles ?

Croyons-nous sincèrement qu’il a été conçu du Saint-Esprit dans le sein de Marie, toujours Vierge ? Croyons-nous qu’il nous a apporté la Bonne Nouvelle du Royaume, et que, par sa Passion et par sa Croix, il nous a rachetés et nous a ouvert la voie du salut ? Croyons-nous qu’il est mort et qu’il est ressuscité pour nous entraîner à sa suite dans la Vie Éternelle ? Croyons-nous, enfin, qu’il est le Pain de Vie, nourriture d’éternité, que nous recevrons tout à l’heure dans la sainte communion ?

Si nous croyons tout cela, mes frères, alors, nous croyons bien au Jésus de la Révélation chrétienne ! Nous croyons bien au Jésus que l’Église en fête, au Ciel et sur la Terre, acclame aujourd’hui à pleine voix. Et nous pouvons contempler, sans arrière-pensée aucune, l’Enfant-Dieu, emmailloté et couché dans la crèche, sous le regard émerveillé de Marie, sa Mère, à qui l’Ange Gabriel avait annoncé : « L’Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c’est pourquoi l’être saint qui naîtra sera appelé Fils de Dieu » (Lc 1, 35). Sous le regard, aussi, de saint Joseph, à qui l’Ange avait dû révéler, pour le rassurer, l’intervention directe de Dieu dans la paternité de Jésus : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ta femme : car ce qui a été engendré en elle vient de l’Esprit Saint ; elle enfantera un fils et tu l’appelleras du nom de Jésus : car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés » (Mt 1, 20-21).

Et, pour bien nous montrer que déjà, dans L’Ancien Testament, le prophète Isaïe avait annoncé cette grande nouvelle (cf. Is 7, 14), l’Évangile poursuit : « Tout ceci advint pour que s’accomplît cet oracle prophétique du Seigneur : Voici que la vierge concevra et enfantera un fils, et on l’appellera du nom d’Emmanuel – ce qui se traduit : Dieu avec nous. » (Mt 1, 22-23)

Alors, mes frères, si nous croyons à ce Jésus, Fils de Dieu venu pour nous sauver, si nous croyons à ce Jésus qui est le Chemin, la Vérité et la Vie, si nous croyons à ce Jésus qui nous a donné son Corps et son Sang en héritage, eh bien ! nous pouvons ensemble nous réjouir sincèrement de cette heureuse naissance.

Cependant, mes frères, si vous avez regardé le téléfilm sur Jésus proposé par TF1 mercredi soir, vous aurez sans doute remarqué qu’au lieu d’un Jésus qui a accompli des signes et des prodiges, qui a chassé les démons (cf. Mt 8, 28-34 ; Mc 5, 1-20 ; Lc 8, 26-39), a multiplié les pains (cf. Mt 14, 13-21 ; Mt 15, 32-39), a marché sur les eaux (cf. Mt 14, 22-33 ; Mc 6, 45-52), a été transfiguré sous les yeux de Pierre, Jacques et Jean (cf. Lc 9, 28-36); au lieu de ce Jésus qui a ramené Lazare à la vie (cf. Jn 11, 1-43) et a institué l’Eucharistie (cf. Mt 26, 26-28 ; Mc 14, 22-24 ; Lc 22, 17-20), a surgi, sur nos écrans, un Jésus d’un tout autre style qui aurait dû, selon le programme, « dépoussiérer » le catéchisme. En fait, ce Jésus-là n’a rien dépoussiéré du tout dans la mesure où il n’avait rien de commun avec celui du catéchisme !

À en croire son père – qui n’est pas Dieu mais son inspirateur, le journaliste Jacques Duquesne (1), bien connu pour ses écrits sulfureux -, il s’agirait du Jésus authentique ! Comprenez : non pas le Jésus des Écritures – qui auraient été plus ou moins trafiquées dès les premiers siècles pour le doter de pouvoirs surnaturels et faire de lui un Dieu – mais un Jésus strictement humain, certes fort charitable et chef politique courageux, mais débarrassé de tout ce qui fait l’essentiel de notre foi chrétienne.

Et il en est de même pour la Vierge Marie, qui, dès le début du téléfilm, se trouve être la mère de plusieurs enfants – opinion largement répandue chez nombre de nos contemporains, qui se plaisent à démolir la naissance virginale et la filiation divine du Seigneur alors que ces vérités n’en sont pas moins présentes dans les Écritures Saintes (cf. Mt 1, 18-25 ; Lc 1, 26-38).

Mais revenons à Jésus, et voyons jusqu’où va cette subtile démolition : chez Duquesne, Jésus n’est plus, évidemment, celui qui change l’eau en vin aux noces de Cana (cf. Jn 2, 1-12), et marche sur les eaux du lac de Tibériade (cf. Mt 14, 25-32). Il n’est plus le Crucifié aux poignets et aux pieds perforés par des clous, qui s’est offert en sacrifice pour les péchés de l’homme. L’important est de montrer au téléspectateur une version de la vie de Jésus qui, aujourd’hui, soit crédible plutôt que fidèle aux récits évangéliques. Version bien évidemment expurgée de toute forme de « surnaturel » qui puisse rappeler à ce même téléspectateur que Jésus est le Messie venu pour le sauver.

Dans le téléfilm, Jésus n’est pas reconnu comme le Fils de Dieu fait Homme. Jésus n’a pas voulu créer une Église, et l’événement pascal, la Résurrection, fondement de l’espérance chrétienne, est à peine mentionné. Pourtant, si le Christ n’est pas ressuscité, dit saint Paul dans sa Première Épître aux Corinthiens, vaine est notre foi (cf. 1 Co 15, 17).

Voilà donc, mes frères, comment au moment de Noël, alors que les familles sont rassemblées autour du petit écran pour regarder une vraie vie de Jésus, l’essentiel de la Révélation chrétienne peut se trouver balayé par un réalisateur, dont il eût été plutôt surprenant qu’il nous présentât un Jésus qui fût Dieu…

Le Jésus de ce téléfilm est un Jésus hybride qui plaira au judaïsme tout autant qu’à l’islam et à la libre-pensée, mais qui ne peut qu’avoir blessé le cœur des chrétiens que nous sommes, tant il est différent du Jésus de la foi. Car, mes frères, la foi chrétienne forme un tout, et, si nous l’embrassons, nous devons mettre inlassablement notre confiance non seulement dans l’Écriture mais aussi dans l’Église, à qui l’Esprit Saint a été donné pour la conduire à la Vérité tout entière (cf. Jn 16, 13 ; 1 Tm 2, 4 ; 1 Tm 3, 15 ; Ep 5, 27). À cet égard, je ne peux que vous renvoyer au Catéchisme de l’Église catholique, qui explique très clairement tout ce que nous sommes tenus de croire lorsque nous nous disons enfants de cette Église. De cette Église qui est notre mère, et qu’il nous faut aimer malgré les erreurs humaines que certains de ses membres ont pu commettre au fil de son histoire. Mais vous le savez, mes frères, un enfant qui aime sa mère lui trouve toujours des circonstances atténuantes lorsqu’elle est attaquée devant les hommes. Alors, aimons notre Église, aimons l’Église de Jésus-Christ, elle qui, depuis bientôt deux millénaires, n’a pas failli à sa tâche de mère en suscitant la foi de tant de générations !

Dans sa bulle d’indiction du grand jubilé de l’an 2000, le pape Jean-Paul II encourage joyeusement tous ceux qui marchent vers le troisième millénaire à la suite de Jésus à se laisser réconforter par la pensée qu’ils apportent au monde la vraie lumière, celle de Jésus, le Christ, qui révèle le visage de Dieu le Père « miséricordieux et compatissant » (Jc 5, 11). Ce Jésus qui, par l’envoi de l’Esprit Saint, rend manifeste le mystère d’amour de la Trinité. Ce Jésus, vrai Dieu et vrai Homme, qui veut que nous soyons saints pour nous faire participer à sa divinité.

Et le pape invite chaque croyant, tout au long de son cheminement terrestre sur les traces de ce Jésus, à une démarche sincère de réconciliation, afin qu’il puisse obtenir le pardon de ses fautes et prendre part à l’Eucharistie dans une communion retrouvée avec Dieu et avec son Église.

Alors, mes frères, oublions le Jésus de Duquesne pour nous réjouir de la naissance du véritable Jésus, qui est notre Sauveur et notre Dieu, et rendons grâce à l’Église de nous avoir transmis, au long des siècles, la vérité de son Message. Demandons aussi à la Vierge Marie, en ce dernier Noël avant l’an 2000, d’intercéder pour nous auprès de son divin Fils afin qu’il fasse grandir en nous les vertus de foi, d’espérance et de charité, et nous conduise ainsi jusqu’à son Ciel de gloire. Joyeux Noël à tous, mes frères !

Amen.

(1) V. Sermon de Noël 2004 inspiré au messager pour une paroisse.