Message du 18 septembre 1984
Bien chers frères,
Chez les êtres humains, la spiritualité peut être comparée à une grande montagne. Au fur et à mesure que l’homme en gravit les étapes, apparaissent en lui des qualités nouvelles. Tout d’abord, il se débarrasse du lourd manteau de biens matériels et de plaisirs malsains qui étouffent son âme et que symbolise la forêt sur le versant de la montagne. Puis cette multiplicité d’arbres laisse place à une seule catégorie de ces derniers, les conifères, seuls capables de résister à la rigueur du climat de l’hiver. Ne conservez, amis, que l’essentiel sur votre chemin vers les sommets, car c’est dans le dépouillement que vous trouverez la route la plus sûre.
Regardez donc plus haut : même la forêt disparaît. Ce niveau de spiritualité qui peut paraître si aride, vu d’une certaine distance, apporte pourtant de si précieuses satisfactions aux êtres qui parviennent à le savourer ! Les alpages sont les lieux de prédilection des troupeaux qui se nourrissent de leur herbe et de leurs fleurettes colorées et s’abreuvent de l’eau pure de leurs torrents. Le berger qui accompagne le troupeau a un point de vue différent de celui de l’homme de la vallée qui jamais ne s’est donné la peine de se rendre par-delà la forêt jusqu’à ce flanc de montagne qui lui semble si dénudé et si dépourvu d’intérêt…
Que dire alors du sommet, où somnolent les neiges éternelles ! Depuis la vallée, il est le point de mire des visiteurs car sa blancheur attire le regard à des kilomètres à la ronde, mais chacun redoute l’ascension qui le conduirait là-haut et préfère rester bien au chaud, bien en sécurité chez soi, et seulement contempler de derrière sa fenêtre la blancheur si lointaine. Seuls quelques alpinistes téméraires abandonnent leurs confortables maisons pour braver les embûches et dépasser leur faiblesse. Armés de piolets et de cordes, ployant sous le fardeau du matériel nécessaire à leur course, ils tentent l’ascension, et, s’ils sont persévérants, parviennent à leur but.
L’expérience de l’alpiniste est unique et nul ne peut en éprouver les indicibles satisfactions. Parvenu au sommet, il découvre la pureté intégrale, le silence parfait, l’immensité du ciel, et, hors du temps qui semble ne plus exister, il contemple les merveilles d’un panorama indescriptible. Mais ce plaisir sain et proche du Ciel n’est pas obtenu sans effort. Combien de souffrance lorsque le vent glacial paralyse les mains et le visage ! Combien de travail pour utiliser convenablement le matériel ! Combien de réflexion pour ne pas commettre la moindre erreur – car elle pourrait être fatale ! Combien de déception lorsque la trajectoire étudiée sur la carte est impraticable et doit être modifiée ! combien de peur, de terreur, lorsque l’alpiniste se retrouve suspendu dans le vide à sa corde après une chute de plusieurs dizaines de mètres ! Mais, chers frères, combien de satisfaction aussi lorsque la victoire est acquise !
Ne soyez pas des êtres pantouflards qui ne fournissent aucun effort et restent enfermés dans leurs douillettes demeures : agissez ! Ne contemplez pas la montagne seulement de votre fenêtre mais chaussez vos souliers, endossez votre équipement et abandonnez votre routine matérielle : prenez votre croix et suivez Jésus ! Soyez Ses soldats, Il sera votre Guide. Il ouvrira pour vous les passages les plus difficiles, Il éclairera les ténèbres de vos nuits, Il apaisera vos angoisses. Vos soucis disparaîtront, car vous n’aurez plus qu’un seul but : la victoire ! C’est par la Croix, à la lumière du Christ, que vous parviendrez à la cime. Vous connaîtrez les difficultés de l’ascension et les ténèbres de la progression, où vous aurez l’impression d’être abandonnés, délaissés, peu à peu dépouillés de biens matériels mais aussi de spiritualité ; où vous n’aurez plus soif d’avenir, plus soif de victoire, plus soif de rien ; où vous préféreriez vous tapir dans un coin et attendre la mort…
Mais le Seigneur est votre Veilleur, votre Portier. Il possède le trousseau des clés des différents passages réservés à votre âme. Faites-Lui confiance et ne perdez jamais courage, car le bonheur inouï de la perfection vous attend.
Les chemins de la sainteté… L’être humain frémit à cette seule idée qui semble bannir de sa vie toute joie, tout plaisir, toute satisfaction. Combien ceux qui pensent cela sont dans l’erreur ! La sainteté délivre des angoisses et des tribulations, des soifs et, souvent, des tentations. L’âme vit par Dieu et en Dieu. Elle puise son énergie dans son Seigneur et rayonne de Son Amour Incommensurable. Dans une joie indescriptible, l’âme ne pense qu’à aimer, à aimer encore et à rendre grâce au Seigneur pour ce si grand bonheur qu’Il lui donne. Les privations et les sacrifices ne lui coûtent plus guère puisqu’elle les accepte sans rébellion, et même s’en réjouit.
Combien plus les joies saines de ce monde sont appréciées par l’âme qui y retrouve la main de son Créateur ! Les paysages deviennent sources de contemplation, le bonheur et la santé sources de réjouissance, l’amour conjugal et filial et l’amitié sources de vie et d’échanges spirituels.
Ah ! frères, efforcez-vous de plaire au Seigneur ! Matez l’animal qui vit en vous et éveillez l’ange qui y sommeille. Que votre âme guidée par l’Esprit Saint progresse dans la lumière et dans la joie vers le Seigneur.
+ Vos frères dans le Christ