Message du 13 avril 2020





Frères,

Compte tenu de la situation que traverse actuellement la France, voici une parabole, que nous avons inspirée à notre messager, dont vous pourrez tirer les conclusions humaines et spirituelles.

UN ENTÊTEMENT PEU OPPORTUN…

Il était une fois, au milieu du siècle dernier, une petite expédition de voitures qui avait pour mission de livrer une précieuse cargaison de remèdes et de potions dans un pays victime de la guerre…

Avant le départ, le chef de file s’adressa avec autorité à tous ses subordonnés :

« Suivez-moi, leur dit-il. Où j’irai vous irez, où je passerai vous passerez, où je m’arrêterai vous vous arrêterez ! »

Et, d’un commun accord, ils acquiescèrent encore et encore.

Le début du voyage fut des plus ordinaires, mais lorsque les voitures atteignirent le pays en guerre, il fallut prendre quelques déviations, qui allongèrent le parcours, créant parfois la confusion.

À intervalles réguliers, le chef de file répétait :

« Suivez-moi ! N’empruntez pas de chemins de traverse ! Ne vous éloignez pas les uns des autres, car nous ne savons pas les dangers qui peuvent nous guetter… »

Et ils roulèrent longtemps, longtemps… Les véhicules avançaient, et la prudence était de mise.

Au bout de plusieurs jours, ils doublèrent, sur la route, un gros camion-citerne rempli de carburant, à destination de la prochaine station-service.

« Si vous voulez vous joindre à nous, dit à son conducteur le chef de file, vous pourrez rouler en queue, nous vous ouvrirons la route ! »

Le conducteur du gros camion-citerne acquiesça et fit ce que le chef de file lui avait proposé.

Les jours passèrent… et la route devint petit à petit tellement étroite qu’il était impossible de doubler. Or, le carburant vint à manquer.

Le véhicule de tête, victime de panne sèche, s’arrêta au milieu d’un bois, et, à sa suite, le reste du convoi.

Le gros camion-citerne, contraint et forcé, s’arrêta à son tour.

« Vous m’aviez proposé de m’ouvrir la route, dit le conducteur. Que se passe-t-il donc ?

– Panne de carburant ! vociféra le chef de file. Nous allons devoir pousser nos voitures jusqu’à la prochaine station… »

Tout le monde devint chagrin et s’inquiéta de la situation.

« Mais nous allons nous épuiser ! répondirent en chœur les autres conducteurs. Pourquoi ne pas demander au camion-citerne de nous approvisionner ?

– Il n’en est pas question ! rétorqua fermement le chef de file, en restant sur ses positions. Il peut être dangereux d’alimenter nos véhicules avec le premier carburant venu. Nous devons gérer l’imprévu, et aller jusqu’à une pompe à essence légalement homologuée. Où va ce camion ? Vous le savez ?  

– Chef, nous lui avons posé la question : il va jusqu’à la prochaine station !

– Attention ! dit le chef de file. Nul n’est jamais trop prudent. Pour ma part, je pousserai ma voiture jusqu’à cette destination, et vous allez faire de même en toute soumission !

– Acceptez donc mon carburant, lança au chef de file le conducteur du gros camion, et réglez-le plus tard au gérant, il n’y verra pas d’objection !

– Monsieur, lui répondit on ne peut plus courtoisement le chef de file, vous êtes bien aimable. Mais je ne veux pas risquer d’abîmer mes voitures. Qui me dit que votre carburant va les dépanner ? Je n’en donnerais pas ma tête à couper !

– Et moi, que vais-je faire ? répondit avec circonspection le conducteur du gros camion.

– Je suis désolé, dit le chef de file, mais compte tenu de l’étroitesse de la route, vous roulerez derrière nous, sans aucun doute ! »

Alors, chacun – à l’exception du conducteur du gros camion-citerne – descendit de sa voiture et la poussa tant bien que mal… longtemps… trop longtemps… jusqu’à la prochaine station.

En queue roulait le gros camion.

Lorsqu’il vit arriver la première voiture, le gérant de la station, depuis sa devanture, dit, tout confus, au chef de file :

« Mon bon monsieur, je suis vraiment désolé : j’attends ma livraison chaque jour et ne vois rien venir ! Point de carburant à vous offrir !

– Il sera bientôt là ! » lança le chef de file, depuis son véhicule, sans plus de précisions.

Arrivèrent bientôt, l’une après l’autre, les voitures du convoi, poussées par leurs conducteurs en émoi… Le gros camion-citerne s’avança en dernier sous les yeux médusés du gérant, pour le ravitailler en précieux carburant.

Alors, depuis la voiture de tête, le chef de file à la cantonade trompette :

« La prudence voulait que nous n’acceptions que le carburant de cette station ! Nous ne devions pas – c’est ce qui vous trompe – en consommer qui ne provînt du tuyau d’une pompe ! »      

Lorsque, quelques jours plus tard, notre convoi parvint, en retard, sur les lieux où on l’attendait, il n’y trouva, l’infortuné, plus que des morts. Seule, une femme y survivait encore :

« La maladie, dit-elle, faute de médicaments, a récemment décimé tous nos habitants : vous n’avez plus qu’à faire demi-tour ! »

Que celui qui a une intelligence spirituelle comprenne !…

+ Vos frères dans la Sagesse

Nihil obstat : Abbé Marc-Antoine Fontelle
Imprimatur : + Mgr Gilbert Aubry