Message du 27 août 1988 (II)
Frères aimés,
Dans un monde où la morale s’effrite et où le sens du bien et du mal s’émousse de jour en jour, nous souhaitons vous donner quelques indications au sujet de la pudeur.
La question, en effet, se posait différemment il y a encore quelques années, car les panneaux publicitaires, les kiosques à journaux et les médias n’étalaient pas aux yeux de tous, et en particulier des enfants, des corps dénudés dans des postures inconvenantes. L’Église dans son Enseignement et les saints dans leurs écrits ont toujours recommandé, aussi bien en société qu’au sein de la famille chrétienne, une grande pudeur afin que les enfants ne soient pas troublés par le spectacle de la nudité des adultes, parents ou frères et sœurs plus âgés. Aujourd’hui cependant, il convient d’aborder cette question d’une manière plus franche et plus approfondie, sans toutefois faire abstraction de la notion de péché qu’elle peut impliquer en banalisant l’impudeur sous prétexte qu’elle sévit pratiquement partout.
« La lampe du corps, c’est ton œil. Ton œil est-il sain, tout ton corps est bien éclairé ; est-il malade, ton corps est dans les ténèbres. Ainsi, prends garde que ta lumière ne soit ténèbres. » (Lc 11, 34-35).
Comprenez donc, chers frères, que les mauvaises pensées associées à la nudité proviennent le plus souvent de l’intérieur de l’homme et qu’elles sont liées à son éducation et à sa sensibilité : de nombreuses tribus vivent nues sans pour autant se sentir impudiques aux yeux des leurs. En revanche, les peuples civilisés, accoutumés au port de vêtements, ont beaucoup de mal à ne point regarder d’un œil concupiscent tout spectacle dévoilant des parties du corps habituellement dissimulées aux regards. La plupart du temps, en vérité, de telles images sont destinées à exciter chez l’homme le désir érotique afin de le pousser à l’achat d’un produit lorsqu’il s’agit de publicité, ou à la convoitise charnelle pure et simple.
Comment donc des enfants que les parents ont cherché coûte que coûte à préserver de toute forme d’atteinte impudique reçoivent-ils ces chocs de l’image hors du milieu familial ? Mal, chers frères, très mal ! C’est pourquoi il est nécessaire de les armer solidement pour affronter le mal en dédramatisant les « choses du sexe » et en en parlant avec simplicité, respect et pureté.
La nudité ne saurait être une difficulté en soi dès lors qu’elle est considérée avec les yeux du Créateur. Nous vous l’avons expliqué, et l’Évangile vous le rappelle clairement aujourd’hui : c’est ce qui sort du cœur de l’homme qui est impur, ce n’est pas la création ! C’est la façon dont il regarde, dont il écoute qui peut être impure. Sous l’influence des démons de l’impureté, à qui il ouvre son cœur, l’homme se plaît à salir ce qui est propre, à ternir ce qui est beau, et ensuite, il est trop tard pour revenir en arrière car toute sa personne est anéantie par le mal. La situation originelle de la Chute se produit de nouveau tous les jours lorsque vous sombrez dans le péché et que vous imprégnez votre corps de la pestilence du mal ! Celui qui se plaît à se rouler dans la boue a bien de la peine à ne point s’y jeter de nouveau lorsqu’il aperçoit une mare de fange, car ses sens en éveil ébranlent sa personne tout entière.
Toute image à laquelle vous aurez associé l’impureté sera pour vous cause de trouble intérieur. Il convient donc, dès l’enfance, de savoir admirer l’œuvre du Créateur sans concupiscence, avec naturel et simplicité, et de se détourner de toute forme de salissure destinée à la pervertir. Jamais, en effet, nous ne vous avons déclaré que le corps de l’homme et celui de la femme ne devaient point être admirés, même dans la plus complète nudité ! Cependant, l’homme a tellement terni la véritable beauté qu’aujourd’hui, vous devez vous méfier de vos pensées et de vos sens ! Comme le plus doux des chiots dressé pour attaquer, vos corps ont été dressés au fil des générations à réagir sexuellement. Libre à vous de vous débarrasser de cette servitude par la prière, l’adoration, le jeûne, les lectures spirituelles. Ce sont ces pratiques qui vous permettront de voir clair dans votre cœur et de vous départir des fantasmes qu’y a accumulés le passé : craintes, jugements, concupiscence, délires de la pensée, images honteuses, résidus de chocs émotionnels, de curiosités malsaines, de lectures et de films mauvais, de désirs et actes pervers.
« C’est la religion chrétienne qui a donné à l’homme le sens de la culpabilité et il s’en serait fort bien passé ! » rétorqueront certains. Mais vous, amis, qui êtes avides de spiritualité et de vérité, remerciez le Seigneur de vous avoir donné le discernement et la Grâce de ressentir encore de la gêne face à l’impudeur, de la honte face à la curiosité, de la souffrance face à chaque insulte faite à la pureté de la Création.
Avec beaucoup de prudence et d’amour, soyez attentifs à ceux qui sont marqués par les séquelles d’un passé difficile, et aidez-les, à la lumière de l’Évangile, à purger leur âme, leur esprit et leur corps des atteintes de l’impureté. Qu’ils apprennent à éduquer leurs yeux et leurs oreilles et à rester purs à l’intérieur, repoussant l’emprise des mauvaises idées pour leur substituer la paix, l’amour, la joie. Dans le mariage comme dans l’amitié, celle dont nous ne cessons de faire l’éloge lorsqu’elle a Dieu pour guide, soyez à l’écoute de l’autre. Aidez-le, avec beaucoup d’amour, à se débarrasser des scories qui entachent son esprit : de ses hontes, de ses craintes, de ses doutes. Exorcisez par un amour pur toute cette lèpre que le mal a inoculée en vous en étant francs et honnêtes, attentionnés et compréhensifs.
Souvenez-vous que lorsque le Seigneur est présent, n’importe quelle plaie peut être cicatrisée. Ne s’est-Il pas offert, en effet, pour guérir les blessures causées par le péché ? Qu’il en soit de même dans le mariage et dans l’amitié. C’est en vous libérant des ténèbres de votre monde intérieur que vous trouverez la Lumière. C’est dans la plus grande franchise, même si cela vous coûte énormément, que vous parviendrez à maintenir de véritables liens surnaturels entre vous.
Dédramatiser la nudité est une chose, le faire sainement en est une autre. S’il existe un véritable « naturisme », celui des tribus primitives, toute forme de naturisme infiltré au sein du monde civilisé ne saurait être naturelle pour bon nombre de raisons : climatiques, médicales, sociales, morales, etc. L’homme d’aujourd’hui n’est pas fait pour vivre nu, et, même sur les plages, un simple vêtement préservera, sans trop alourdir le nageur et par souci d’hygiène élémentaire, ses organes reproducteurs du contact direct avec l’extérieur. Même si le naturisme se veut pudique et tente sincèrement de reconquérir un état antérieur, il n’est pas toujours dénué chez les uns de curiosité, chez les autres d’orgueil, et il peut présenter des dangers certains pour la santé de l’homme comme de la femme. De plus, la civilisation est là, qui a laissé son empreinte, et il n’est pas sain pour un chrétien de vivre complètement dévêtu, même pendant les vacances d’été.
Si des personnes souhaitent se retrouver nues sur les plages, qu’elles s’éloignent donc des autres et ne s’exposent pas aux regards du monde. Car les plages deviennent des endroits dangereux pour les jeunes enfants élevés dans la pudeur : si, au cours d’une baignade ou d’une promenade, ils se trouvent, en effet, confrontés à quelque spectacle indécent, une seule seconde aura suffi à détruire ce que des parents se seront tant appliqués à construire.
Il en est de même pour l’éducation sexuelle de masse pratiquée en milieu scolaire sans amour ni pudeur : elle n’est que le résultat d’une action sociale malsaine et irréfléchie, menée par des démolisseurs de la morale, qui continuent de sévir et de détruire toute forme de vertu chère au Seigneur. C’est en fait aux parents eux-mêmes d’instruire leurs enfants sur le corps et son fonctionnement, au rythme de leurs demandes, avec beaucoup de douceur et sans les choquer. Car ces informations ne doivent pas être livrées d’une manière terre à terre ou désordonnée. L’amour est comme un tableau de maître : discourir pendant des heures sur le calibre du pinceau qui l’a composé ne saurait être, à notre avis, la meilleure façon d’en faire connaître toute la richesse. Si donc les enfants voient que leurs parents s’aiment, tout en restant préservés du spectacle d’une trop grande intimité, ils comprendront que cet amour-là n’est pas de même nature que celui qu’exhibe, dans toute son animalité, la société des hommes. Les explications que leurs parents leur donneront sur la relation d’amour prendront alors une tout autre dimension.
Être pudique aujourd’hui face à ses propres enfants ne saurait signifier éviter à tout prix de dévoiler sa nudité. Cependant, le discernement doit toujours intervenir car le Démon est très fort pour salir ce qui est pur. Afin que l’enfant ne soit ni choqué ni troublé, une fois qu’il aura franchi le portail de la maison, par la nudité d’autrui, impérieuse, obscène, érotique, triviale, il convient que les parents chrétiens adoptent un comportement à la fois pudique et naturel, exempt de pruderie et de répression morale. C’est en ce sens qu’il doit y avoir évolution par rapport aux principes des générations passées. Il est évident que la Sainte Famille n’a pas été confrontée à de telles obscénités et qu’en cela, elle a été préservée d’un poison bien délétère ; mais pour les familles d’aujourd’hui, une stratégie de prévention nous semble être la solution la plus raisonnable dans la plupart des cas. Afin de vous amener à mieux comprendre ce choix, écoutez, chers frères, cette comparaison.
En temps de paix, nul ne songerait à boire de l’eau polluée. Mais sur le champ de bataille, la situation est différente : s’il ne veut mourir de soif ou s’empoisonner, le bon soldat n’ignore point que sa trousse de survie contient des comprimés qu’il suffit d’additionner à l’eau polluée pour la rendre potable ; son goût n’est alors pas des plus agréables, mais elle permet à l’homme de survivre et de continuer la lutte ! Il en est de même, chers frères, pour la nudité. Si depuis sa plus tendre enfance, le jeune garçon a été habitué à se rendre, de temps à autre, à la salle de bains en même temps que son père, il ne sera point choqué, en son adolescence, par les transformations subies en son propre corps. Il en est de même pour la petite fille avec sa maman. Si les frères et les sœurs, alors qu’ils sont enfants, prennent souvent leur bain ensemble, cela les conduira à constater leurs différences sans heurt et à poser des questions auxquelles des parents compréhensifs pourront apporter des réponses sensées.
Cependant, au moment de l’adolescence, il sera bon que chacun possède sa propre chambre, ou tout au moins que les garçons soient séparés de leurs sœurs. Une attitude simple et naturelle des uns et des autres évitera souvent bien des erreurs. Il faut, en effet, apprendre à l’enfant à interroger librement ses parents sans crainte d’être rabroué, et à leur avouer ses curiosités, ses problèmes, plutôt que d’aller les confier à la rue, où quelque chenapan l’initiera au vice et détruira sa belle pureté. Il faut aussi expliquer à l’adolescent le caractère profondément pernicieux de la publicité, des mauvais films et de la mauvaise littérature, et les bienfaits de l’éducation de la volonté et de la maîtrise de soi pour conserver sa pureté.
Une précision nous semble toutefois nécessaire : si vous n’avez pas habitué votre enfant depuis sa naissance à vous voir nus de temps à autre, ne prenez pas l’initiative de le faire après la lecture de ce message, car il en serait certainement choqué ! Il faut en tout de la mesure et de la réflexion.
En ce qui concerne la vie de la famille, la nudité permanente du couple à la maison pour des raisons de « bien-être » ne saurait être recommandable : un tel comportement n’est, en effet, ni très normal, ni très commode. Quant à l’argument souvent invoqué : « Les enfants sont habitués, ils s’en moquent… », il reste très subjectif, car les parents ne savent jamais l’impact que ce comportement excentrique peut avoir sur leur psychologie. Qu’ils se montrent donc très prudents !
Tout couple devrait enfin comprendre que, même dans l’intimité, il doit rester pudique. Les époux ont trop souvent tendance à croire que le Mariage n’est autre que la légalisation de leur concupiscence, et ils n’hésitent pas à livrer leurs corps à des jeux érotiques d’une extrême bassesse. Quelle infamie, chers frères ! quelle perversion ! quelle hypocrisie ! Mais le Seigneur n’est pas dupe. Combien d’épouses se voient obligées, sous la menace de leur mari, par crainte d’être battues ou par esprit de sacrifice, de se soumettre à leurs immondes caprices ! De tels comportements sont inadmissibles dans un couple chrétien, et celui qui en aura usé devra s’en confesser sincèrement et prendre la résolution d’y mettre un terme définitif, sinon il devra en rendre compte devant Dieu. Même entre mari et femme, ce péché est plus grave que la fornication ! Que les couples impudiques qui liront ces pages aient la sagesse de méditer ces dernières paroles.
Frères aimés, relisez donc le passage d’Évangile de ce jour et vous comprendrez tout cela. Dialoguez aimablement avec vos enfants afin qu’ils s’épanouissent dans une grande pureté et que leur esprit reste libre de tout souci, de toute question, de toute curiosité. C’est là la véritable confiance, le véritable amour ! Et surtout, souvenez-vous : c’est l’intérieur de l’homme perverti qui tue ce qui est beau, ce qui est saint ! Que les adultes comme les enfants maintiennent totalement en ordre leur demeure intérieure pour que rien ne vienne plus infecter la semence de Vie Éternelle que Dieu a déposée en chacun d’eux.
Que le Seigneur vous bénisse et vous garde, chers frères, dans la pureté. Restez simples, naturels, et conservez un regard pudique face à la nudité, pur face à l’impudeur, émerveillé face à la beauté du véritable amour. Nous prions le Seigneur et Sa Mère Immaculée qu’Ils vous viennent en aide.
+ Vos frères dans la Pureté